La naissance du prolétariat.

4ème question. – Comment est apparu le prolétariat ?
Réponse.
Le prolétariat est apparu à la suite de la révolution industrielle, qui s’est produite en Angleterre au cours de la seconde moitié du dernier siècle,(4)  et qui s’est répétée depuis dans tous les pays civilisés du monde (5). Cette révolution industrielle a été provoquée par l’invention de la machine à vapeur, les différentes machines à filer, du métier à tisser mécanique et de toute une série d’autres appareils mécaniques. (6) Ces machines qui étaient chères, et que seuls par conséquent, les gros capitalistes pouvaient se procurer, transformèrent complètement tout l’ancien mode de production, et éliminèrent les anciens artisans, du fait qu’elle fabriquaient les marchandises mieux et à meilleur marché que les artisans ne pouvaient le faire avec leurs rouets et leurs instruments grossiers C’est ce qui explique pourquoi l’introduction des machines mit complètement l’industrie aux mains des gros capitalistes et enleva toute valeur à la petite propriété artisanale (instruments, métiers, etc.), de sorte que les capitalistes eurent bientôt tout entre leurs mains et que les ouvriers n’eurent plus rien.  Le système de la fabrique fut d’abord introduit dans l’industrie de l’habillement. Puis, la première impulsion une fois donnée, ce système s’étendit très rapidement à toutes les branches d’industrie, notamment à l’imprimerie, à la poterie, à la métallurgie. Le travail fut de plus en plus réparti entre les différents ouvriers, de telle sorte que l’ouvrier qui faisait jusqu’alors un travail entier, ne fit plus désormais qu’une partie de ce travail. Grâce à cette division du travail, les produits purent être fabriqués plus rapidement, par conséquent à meilleur marché. Elle réduisit l’activité de chaque ouvrier à un geste mécanique très simple, constamment répété, qui pouvait être fait non seulement aussi bien, mais même  mieux par une machine. Toutes les branches de la production tombèrent l’une après l’autre sous la domination du machinisme et de la grande industrie, tout comme le tissage et le filage. Le résultat fut qu’elles tombèrent complètement entre les mains des gros capitalistes, et que les ouvriers y perdirent ce qui leur restait encore d’indépendance. Peu à peu, outre la manufacture proprement dite, l’industrie artisanale tomba de plus en plus sous la domination de la grande industrie, en ce sens qu’ici de gros capitalistes, en installant de grands ateliers, où les frais généraux étaient moindres et où le travail pouvait être également divisé, éliminèrent peu les petits producteurs indépendants. (7) C’est ce qui explique pourquoi dans les pays civilisés, presque toutes les branches de la production ont été incorporées dans le système de la grande industrie, et, pourquoi, dans toutes les branches d’industrie, la production artisanale et la production manufacturière sont éliminées par la grande industrie. C’est ce qui explique également la ruine, de jour en jour plus prononcée, de l’ancienne classe moyenne, artisanale, la transformation complète de la situation des ouvriers, et la constitution de deux nouvelles classes, qui englobent peu à peu les autres, à savoir :
1° la classe des gros capitalistes, qui sont déjà, dans les pays civilisés, en possession exclusive de tous les moyens d’existence et des matières premières et instruments (machines, fabriques) nécessaires à la production des moyens d’existence : c’est la classe des bourgeois, ou la bourgeoisie ;
2° la classe de ceux qui ne possèdent rien et qui sont obligés de vendre leur travail aux bourgeois pour recevoir d’eux les moyens de subsistance nécessaires à leur entretien : c’est la classe des prolétaires, ou le prolétariat. (8)

(4) C’est à dire du XVIIIème siècle.
(5) Engels fait ici référence essentiellement aux pays en cours ou en voie d’industrialisation.
(6) Depuis, la révolution scientifique et technique a concerné tous les secteurs économiques, bien au delà du monde industriel touchant des catégories de travailleurs bien au delà du monde ouvrier.
(7) Le commerce, les services les plus divers n’ont pas échappé à ce mouvement.
(8) L’extension de l’automatisation des taches les plus diverses, entraine une diversification dans la composition du prolétariat, mais élargit les frontières de celui-ci.

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