Et la famille ?

21ème question. – Quelles répercussions aura le régime communiste sur la famille ?
Réponse. Il transformera les rapports entre les sexes en rapports purement privés, ne concernant que les personnes qui y participent, et où la société n’a pas à intervenir. Cette transformation sera possible,, du moment qu’il supprimera la propriété privée, qu’il élèvera les enfants en commun et détruira ainsi les deux bases principales du mariage actuel, à savoir la dépendance de la femme vis-à-vis de l’homme et celle des enfants vis-à-vis des parents. C’est là qu’est la réponse à toutes le criailleries des moralistes bourgeois sur la communauté des femmes que veulent, paraît-il, introduire les communistes. La communauté des femmes est un rapport qui appartient uniquement à la société bourgeoise et qui est réalisée actuellement dans la prostitution. Mais la prostitution repose sur la propriété privée et disparaît avec elle.  Par conséquent, l’organisation communiste, loin d’introduire la communauté des femmes, la supprimera au contraire.

Conséquences…

20ème question. – Quelles seront les conséquences de la suppression de la propriété privée ?
Réponse. En enlevant aux capitalistes privés toutes les forces productives et tous les moyens de transport, ainsi que l’échange et la répartition des produits, en les administrant selon un plan établi en se basant sur les ressources et les besoins de la collectivité, la société supprimera tout d’abord toutes les conséquences néfastes qui sont encore liées à l’existence de la grande industrie. Les crises disparaissent ; la production étendue, qui est, en réalité, dans la société actuelle, une surproduction, et constitue une cause si importante de misère ne suffira plus aux besoins et devra être étendue encor davantage. Au lieu de créer de la misère, la production au delà des besoins de la société assurera la satisfaction des besoins de tous, et fera apparaître de nouveaux besoins, en même temps que les moyens de  les satisfaire. Elle sera la condition et la cause de nouveaux progrès qu’elle réalisera sans jeter, chaque fois, comme c’était le cas jusqu’ici, le trouble dans la société. La grande industrie, libérée du joug de la propriété, s’étendra dans de telles proportions que son extension actuelle apparaîtra aussi mesquine que la manufacture à côté de la grande industrie moderne. Le développement de l’industrie mettra à la disposition de la société une masse de produits suffisante pour satisfaire les besoins de tous. De même, l’agriculture qui, sous le régime de la propriété et du parcellement, ne pouvait profiter des améliorations déjà réalisées et des découvertes scientifiques, connaître un essor tout nouveau et mettre à la disposition de la société une quantité tout à fait suffisante de produits. Ainsi, la société fabriquera suffisamment de produits pour pouvoir organiser la répartition de façon à satisfaire les besoins de tous ses membres !1). La séparation de la société en différentes classes antagonistes sera rendue ainsi superflue. Elle deviendra non seulement superflue, mais encore incompatible avec le nouvel ordre social. L’existence des classes est provoquée par la division du travail. Dans la nouvelle société, la division du travail, sous ses anciennes formes, disparaitra complètement. Car, pour porter la production industrielle et agricole au niveau que nous avons dit, les moyens mécaniques et chimiques ne suffisent pas. Les capacités des hommes qui utilisent ces moyens devront être également développées dans la même proportion. De même que les paysans et les ouvriers de manufacture du siècle dernier modifièrent toute leur façon de vivre et devinrent même des hommes complètement différents après avoir été incorporés dans les grande industrie, de même la production en commun par l’ensemble de la collectivité et le nouveau développement de la production qui en résultera nécessiteront et créeront des hommes différents de ceux d’aujourd’hui, dont chacun est étroitement soumis à une branche particulière de la production, enchaîné à elle,  n’a développé , par conséquent, qu’une seule de ses facultés, au dépens des autres, et ne connaît qu’une branche ou même qu’une partie d’une branche de la production. Déjà, l’industrie actuelle a de moins en moins besoin de tels hommes. L’industrie exercée en commun, et suivant un plan, par l’ensemble de la collectivité, suppose des hommes dont les facultés sont développées dans tous les sens et qui sont en état de dominer tout le système de production. La division du travail, déjà minée par le progrès du machinisme, et qui fait de l’un un paysan et de l’autre un cordonnier, du troisième un ouvrier d’usine, du quatrième un spéculateur à la Bourse, disparaitra donc complètement. L’éducation fera traverser rapidement aux jeunes gens tout le système de production, elle les mettra en état de passer successivement de l’une à l’autre  des différentes branches de la production, d’après les besoins de la société ou leurs propres inclinations. Elle leur enlèvera, par conséquent, le caractère unilatéral que leur donne la division actuelle du travail. Ainsi, la société organisée sur la base communiste donnera à ses membres l’occasion d’occuper dans tous les sens leurs facultés développées d’une façon adéquate. Il en résulte que toute différence entre les classes disparaîtra également. De telle sorte que la société communiste, d’une part, est incompatible avec l’existence des classes, et, d’autre part, fournit elle même les moyens de supprimer ces différences de classes.
L’antagonisme entre la vile et la campagne disparaîtra également. L’exercice de l’agriculture et de l’industrie par les mêmes hommes, au lieu d’être fait par des classes différentes, est déjà, pour des raisons tout à fait matérielles, une condition nécessaire de l’organisation communiste. La dispersion de la population rurale à la campagne, à côté de la concentration de la population industrielle dans les villes, est un phénomène qui correspond à une étape de développement inférieur de l’agriculture et de l’industrie, un obstacle au progrès qui se fait sentir dès maintenant.
L’association générale de tous les membres de la société en vue de l’utilisation collective et rationnelle des forces productives, l’extension de la production dans des proportions telles qu’elle puisse satisfaire les besoins de tous, la suppression du système d’organisation social dans lequel les besoins des uns ne sont satisfaits qu’au dépens des autres, la suppression complète des classes et de leurs antagonismes, le développement complet des capacités de tous les membres de la société au moyen de la suppression de la division du travail, telle, du moins, qu’elle était réalisée jusqu’ici, au moyen de l’éducation basée sur le travail, du changement d’activité, de la participation de tous aux jouissances créées par tous, de la fusion entre la ville et la campagne, telles seront les principales conséquences de la suppression de la propriété privée.

(1) Nul doute que la notion de « besoin » doit être revisitée à la lueur des évolutions induites par les évolutions intervenues depuis l’écriture de ce texte.

Au-dessus de Musculdy

Accessible en voiture à partir du col d’Osquish, la chapelle St Antoine domine le village de Muskuldy.
A partir de ce dernier, un beau circuit permet d’accéder à cette chapelle.
Le retour par le sommet voisin d’Elaudi offre de belles perspectives sur les sommets souletins et la vallée de la Bidouze.

La chapelle St Antoine

Au cours de la balade, découverte de vieilles croix souletines naïves du XVIIè siècle.
On trouve ce type de croix en divers endroits de la Soule.

Vieille croix souletine

La révolution : où ?

19ème question. – Cette révolution se fera-t-elle dans un seul pays ?
Réponse. Non, la grande industrie en créant le marché mondial, a déjà rapproché si étroitement les uns des autres les peuples de la terre et, notamment les plus civilisés, que chaque peuple dépend étroitement de ce qui se passe chez les autres. Elle a, en outre,  unifié, dans tous les pays civilisés, le développement social à tel point que, dans tous ces pays, la bourgeoisie et le prolétariat sont devenus les deux classes les plus importantes de la société, et que l’antagonisme entre ces deux classes est devenu aujourd’hui l’antagonisme fondamental de la société. La Révolution communiste, par conséquent, ne sera pas une révolution purement nationale. Elle se produira en même temps dans tous les pays civilisés, c’est à dire tout au moins en Angleterre, en Amérique, en France et en Allemagne (1). Elle se développera dans chacun de ces pays, plus rapidement ou plus lentement, selon que l’un ou l’autre de ces pays possède une industrie plus développée, une plus grande richesse nationale et une masse plus considérable de forces productives. C’est pourquoi elle sera plus lente et plus difficile en Allemagne, plus rapide et plus facile en Angleterre. Elle exercera  également sur tous les autres pays du globe une répercussion considérable, et transformera complètement leur mode de développement. Elle sera une révolution mondiale et devra par conséquent avoir un terrain mondial.

N’oublions pas que ceci a été écrit en 1847, c’est-à-dire à une époque où la Russie était encore un pays purement agraire. (Note de l’éditeur)

Le cours de la révolution.

18ème question. – Quel cours prendra cette révolution ?
Réponse. Elle établira tout d’abord une constitution démocratique et, par là, directement ou indirectement, la domination politique du prolétariat. Directement, en Angleterre, où les prolétaires constituent déjà une majorité du peuple. Indirectement, en France et en Allemagne, où la majorité du peuple est composée non seulement de prolétaires, mais aussi de petits paysans et de petits bourgeois qui ne sont encore qu’en voie de prolétarisation, et dépendent en tout ce qui concerne leurs intérêts politiques, plus ou moins du prolétariat, et devront donc, par conséquent, se soumettre rapidement aux revendications de la classe ouvrière. Cela nécessitera peut-être une deuxième lutte, mais qui ne peut se terminer que par la victoire du prolétariat.
La démocratie ne serait d’aucune utilité pour le prolétariat, s’il ne l’utilisait pas immédiatement pour prendre des mesures comportant des atteintes directes à la propriété privée et assurant l’existence du prolétariat. Les plus importantes de ces mesures, telles qu’elles sont maintenant indiquées comme découlant nécessairement de la situation, sont les suivantes :
1° réduction de la propriété privée au moyen d’impôt progressifs, de forts impôts sur les successions, suppression du droit de succession en ligne collatérale (frères, neveux, etc., etc.), emprunts forcés, etc. ;
2° expropriation progressive des propriétaires fonciers, des industriels, des propriétaires de chemins de fer et armateurs, soit au moyen de la concurrence de l’industrie d’Etat, soit directement contre indemnité en assignats ;
3° confiscation des biens de tous les émigrés et rebelles à la majorité du peuple ;
4° organisation du travail ou occupation des ouvriers dans les domaines, les fabriques et ateliers nationaux, en supprimant la concurrence des ouvriers entre eux et en obligeant les industriels qui subsisteront encore à payer le même salaire élevé payé par l’Etat ;
5° Obligation au travail pour tous les membres de la société, jusqu’à la suppression de la propriété privée ; constitution d’armées industrielles, particulièrement pour l’agriculture ;
6° centralisation dans les mains de l’Etat du système du crédit et du commerce de l’argent, au moyen de la création d’une banque nationale, avec un capital d’Etat, et suppression de toutes les banques privées ;
7° multiplication des fabriques nationales, des ateliers de chemins de fer ; navire, défrichement de toutes les terres et amélioration des terres déjà cultivées au fur et à mesure de l’augmentation des capitaux et des forces ouvrières dont dispose le pays ;
8° éducation de tous les enfants, à partir du moment où ils peuvent être enlevés aux soins matériels, dans des institutions nationales et aux frais de la nation.  (Education et fabrication). (1)
9° construction de grands palais sur les domaines nationaux pour servir d’habitation à des communautés de citoyens occupés dans l’industrie ou l’agriculture, et unissant les avantages de la vie citadine à ceux de la vie à la campagne, sans avoir leurs inconvénients ;
10° destruction de toutes les habitations et quartiers insalubres et mal construits ;
11° droit de succession égal aux enfants légitimes et non légitimes ;
12° concentration de tous les moyens de transport dans les mains de l’Etat ;
Toutes ces mesures ne pourront naturellement pas être appliquée d’un seul coup. Mais chacune entraine nécessairement la suivante. Une fois accomplie la première atteinte radicale à la propriété privée, le prolétariat se verra obligé d’aller toujours de l’avant et de concentrer de plus en plus entre les mains de l’Etat tout le capital, l’agriculture et l’industrie, les transports et les échanges. C’est le but que poursuivent toutes ces mesures, et elles seront applicables  et obtiendront leur effet centralisateur au fur et à mesure de l’accroissement des forces productives du pays, réalisé grâce au travail du  prolétariat.
Enfin, quand tout le capital, toute la  production et tous les échanges seront concentrés dans les mains de l’Etat, la propriété privée tombera d’elle même, l’argent deviendra superflu et la production sera augmentée et les hommes seront transformés  tel point qu’on pourra également supprimer les derniers rapports de l’ancienne société.

(1) Les mots entre parenthèses semblent indiquer que l’auteur se proposait de développer ce point en montrant la nécessité d’appuyer tout le système d’éducation sur le travail (note du traducteur)

De la possibilité.

17ème question. – La suppression de la propriété privée est-elle possible d’un seul coup ?
Réponse. Non, pas plus que l’on peut accroître d’un seul coup les forces productives déjà existantes, de telle sorte qu’on puisse établir le communisme du jour au lendemain. La révolution prolétarienne ne pourra par conséquent que transformer peu à peu la société actuelle, et ne pourra supprimer complètement la propriété privée que quand on aura créé la quantité nécessaire de moyens de production.

De la voie pacifique.

16ème question. –La suppression de la propriété privée est-elle possible par la voie pacifique ?
Réponse. Il serait à souhaiter que cela fût possible et les communistes seraient certainement les derniers à s’en plaindre. Les communistes savent très bien que toutes les conspirations secrètes sont, non seulement inutiles, mais même nuisibles. Ils savent trop bien que les révolutions ne se font pas par ordre, mais qu’elles sont partout et toujours la conséquence nécessaire des circonstances absolument indépendantes de la volonté et de la direction des partis, et même des classes. Mais ils voient également que le développement du prolétariat se heurte dans presque tous les pays civilisés à des répressions brutales, et qu’ainsi tous les adversaires des communistes travaillent de toutes leurs forces à la révolution. Si le prolétariat opprimé est ainsi poussé à la révolution, nous, communistes défendrons par l’action, comme maintenant par la parole, la cause des prolétaires.

Pic Soulaing

Courte balade en Barétous, dans les Pyrénées Occidentales.
Elle se déroule en grande partie à l’ombre de la belle forêt de Labeys pour aboutir à un beau plateau arrondi.
La vue à 360 degrés offre de belles perspectives, en particulier sur La Pierre Saint Martin et le massif du pic d’Anie.

Le Pic d’Arlas

Possibilité de rallonger la randonnée en montant sur le pic voisin de Guilhers.

De la possibilité de supprimer la propriété privée

15ème question. –La suppression de la propriété privée n’était donc pas possible autrefois ?
Réponse.  Non. Toute transformation de l’ordre social, tout changement dans les rapports de propriété, sont la conséquence nécessaire de l’apparition de nouvelles forces productives ne correspondant plus aux anciens rapports de propriété. La propriété privée elle même est apparue. Car la propriété privée n’a pas toujours existé. Lorsque, à la fin du moyen âge, un nouveau mode de production est apparu dans la manufacture, mode de production en contradiction avec la propriété féodale et corporative de l’époque, cette production manufacturière, ne correspondant plus aux anciens rapports de production, donna naissance à une forme de propriété : la propriété privée. En effet, pour la manufacture et pour la première période du développement de la grande industrie, il n’y avait pas d’autre forme de société possible que la société basée sur la propriété privée. Tant qu’on ne peut pas produire une quantité suffisante de produits pour que non seulement il y en ait assez pour tous,  mais qu’il en reste encore un certain excédent pour l’augmentation du capital social et pour le développement des forces productives, il doit nécessairement y avoir une classe dominante, disposant des forces productives de la société, et une classe pauvre, opprimée. La constitution et le caractère de ces classes dépendent chaque fois de la phase de développement de la production. Le société du moyen âge, qui repose sur la culture de la terre, nous donne le seigneur féodal et le serf ; les villes de la fin du moyen âge nous donnent le maître artisan, le compagnon et le journalier, le dix septième siècle, la manufacture et l’ouvrier ; le dix neuvième siècle, le grand industriel et le prolétaire. Il est clair que, jusqu’à présent, les force productives n’étaient pas suffisamment développées pour produire assez pour tous, et que la propriété est devenue, pour ces forces productives, un obstacle. Mais aujourd’hui :
1° où, par suite du développement de la grande industrie les capitalistes et les forces productives se multiplient dans une mesure encore inconnue jusqu’ici où les moyens existent d’augmenter rapidement jusqu’à l’infini ces force productives ;
2° où ces forces productives sont concentrées dans les mains d’un petit nombre de capitalistes, tandis que la grande masse du peuple est de plus en plus rejetée dans le prolétariat ; et que sa situation devient plus misérable et plus insupportable dans la mesure même où les richesses des capitalistes augmentent ;
3° où ces forces productives puissantes, se multipliant avec une telle facilité, ont tellement dépassé le cadre de la propriété privée et du régime bourgeois actuel qu’elles provoquent à chaque instant les troubles les plus considérables dans l’ordre social, la suppression de la propriété privée est devenue non seulement possible, mais même absolument nécessaire.